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Machines, automobiles : Takuya Takaoka, Mitsubishi Heavy Industries France
Bonne année à tous.
Le domaine des machines et automobiles recouvrant une gamme extrêmement large de produits et de secteurs, permettez-moi de me concentrer ici sur ce qui constitue le corps de métier de notre entreprise : l’énergie.
Le 27 novembre dernier, le ministère de la Transition écologique et solidaire a publié la "Stratégie française pour l’énergie et le climat". Ce document présente les orientations de la nouvelle stratégie pour l’énergie et le climat devant être déterminée en 2019 ainsi que les grandes lignes de la "Stratégie nationale bas-carbone (SNBC)" et de la "Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE)", sur lesquelles repose cette nouvelle stratégie. La décarbonisation est une mégatendance mondiale et ce texte publié par la France, berceau de l’Accord de Paris et grand pays producteur d’énergie nucléaire, est d’autant plus digne d’attention qu’il impacte directement et indirectement les débats politiques menés dans l’hémisphère nord, que ce soit dans les pays européens ou au Japon. En voici une partie, au titre des perspectives pour l’année 2019 :
- La stratégie française pour l’énergie et le climat aura à l’horizon 2023 sur les citoyens français les impacts ci-dessous. Les mesures en ce sens seront mises en place consécutivement.
- Remplacement de 10 000 chauffages charbon (la moitié de ceux restants) et de 1 million de chaudières fioul (sur un parc restant de 3 millions) par des équipements de chauffage plus performants,
- 9,5 millions de logements chauffés au bois (avec un appareil efficace),
- 3,4 millions d’équivalents logements raccordés à un réseau chaleur de ville,
- 1,2 millions de voitures particulières électriques (électriques et hybrides rechargeables) et 100 000 points de recharge publics,
- 1 million de Français ayant bénéficié d’une aide pour changer de véhicule,
- toutes les centrales électriques à charbon arrêtées,
- 2 réacteurs nucléaires arrêtés,
- 65 000 à 100 000 sites photovoltaïques en autoconsommation,
- réduction des gaz à effet de serre de 15% entre 2015 et 2023,
- 2,5 millions de logements rénovés (y compris rénovation avec isolation très haute performance).
- La Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) décrit la feuille de route de la France pour conduire la politique d’atténuation du changement climatique. Elle est issue d’une concertation avec tous les acteurs concernés (entreprises, ONG, syndicats, groupes de consommateurs, parlementaires, collectivités locales) et les citoyens. Elle ne privilégie aucune technologie en particulier et porte sur des méthodes rationnelles permettant d’atteindre les objectifs fixés.
L’objectif de cette stratégie est d’atteindre la neutralité carbone en France d’ici à 2050 pour accélérer l’exécution de l’Accord de Paris.
La neutralité carbone s’entend comme l’atteinte de l’équilibre entre les émissions et les absorptions anthropiques de gaz à effet de serre (absorption par les espaces naturels gérés par l’homme tels que les forêts, prairies, sols agricoles, zones humides ou par les processus industriels de collecte, stockage, ou réutilisation du CO2).
Dans cette stratégie, les orientations politiques se définissent comme suit :
- décarboner complètement la production d’énergie d’ici à 2050 et se reposer uniquement sur les sources d’énergie suivantes : biomasse (déchets de l’agriculture et de la sylviculture, bois énergie), chaleur issue de l’environnement (géothermie, pompes à chaleur) et électricité décarbonée.
- réduire fortement la consommation d’énergie dans tous les secteurs en améliorant grandement l’efficacité énergétique et en développant la sobriété.
- La Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) comprend des mesures visant à diversifier le mix énergétique et cite l’hydroélectricité, le solaire photovoltaïque, l’éolien terrestre et l’éolien en mer comme filières contribuant à l’atteinte des objectifs de la Loi de transition énergétique qui prévoit que 40% de la production nationale d’électricité doit provenir des énergies renouvelables d’ici à 2030. Les fortes baisses de coûts observées dans ces filières permettent des développements importants avec des soutiens publics limités. Par ailleurs, la diminution du nombre de réacteurs nucléaires se traduira par une approche réaliste et pilotée, économiquement et socialement viable, avec comme objectif de réduire la part du nucléaire dans le mix à 50% à l’horizon 2035 contre les 75% actuels. Concernant l’après-2035, il est impossible dans l’état actuel des connaissances de déterminer avec certitude la technologie de production d’électricité qui sera la plus compétitive pour remplacer le parc nucléaire existant, entre le nucléaire ou les énergies renouvelables couplées au stockage ou encore d'autres solutions de flexibilité. Un rapport sur le sujet devrait être rendu mi-2021, qui peut se concevoir comme la volonté de déterminer une programmation en fonction des progrès dans les innovations et recherches développées actuellement : hydrogène, technologies de stockage, intégration des technologies numériques, pilotage de la demande, power-to-gas ou encore énergies renouvelables.
La PPE ne fait pas mention des sources électriques de secours allant de pair avec l’adoption des énergies renouvelables. Comme l’ont montré les manifestations de 2018 des gilets jaunes contre l’augmentation de la fiscalité des carburants, les électeurs ne se satisfont pas des explications liant augmentation des taxes et décarbonisation. Il n’empêche que l’ampleur et la charge des coûts des technologies liées à des sources électriques de secours non profitables (on parle de 1,4 milliards d’euros en Allemagne en 2017) rendent nécessaire un débat quant à leur équilibre avec les nouvelles technologies.
Avec les mots-clés décarbonisation, économies d’énergie, promotion des énergies renouvelables, il n’y a pas de différence majeure avec ce qui se dit dans les média japonais. Néanmoins, dans la mégatendance qui se dégage et qui est celle de la décarbonisation, il convient de garder à l’esprit certains éléments (1/ les mesures vont jusqu’en 2023, 2/ le nucléaire reste un choix même après 2035 et 3/ les progrès dans l’innovation et la recherche peuvent influencer la programmation énergétique) et de faire en sorte de les intégrer aux activités économiques.